PLUi VS stratégie de conception
L'enquête publique pour la modification n°3 du PLUi d'Aix Marseille Métropole démarre.
L'ambition affichée est à mon sens résumée dans la nouvelle OAP "NATURE EN VILLE - SANTÉ - RÉSILIENCE", mais en aura-t-on les moyens...
Ce sont principalement des recommandations, pas nécessairement des prescriptions. Comment sécuriser la mise au point d'un projet si l'articulation avec ce qui est rendu obligatoire n'est pas clairement définie ?
Sur l'essentiel des points, il semble que la majorité des projets élaborés par les architectes y répondent déjà, puisque c'est l'objet de notre mission et le rôle reconnue à l'architecture depuis 1977.
Ce qui est moins ambitieux, ce sont (encore) tous les points du règlement qui ne jouent pas la réciproque, et qui finiront par lutter contre les qualités de projet recherchées.
En quelques exemples :
Les distances d'implantation par rapport aux plantations existantes qui n'envisagent pas les modes de construction disponibles pour respecter la distance nécessaire entre fondations et racines, tout en permettant de placer façades et espaces utiles plus proches. Conserver les composantes naturelles remarquables a du sens, mais lorsque cela dégrade de manière notable la constructibilité d'un terrain, c'est une forme de non sens si on cherche à moins et mieux utiliser le sol.
La détermination des hauteurs totales n'évolue pas. Si le Code de l'Urbanisme prévoit déjà des dérogations pour aller plus haut en secteur dense, il est dommage qu'une limitation non contextualisée reste la seule option retenue. Typiquement, la hauteur de 7m qui s'applique à la destination logement dans certains secteurs et qui réduit très nettement la possibilité de monter plus haut pour occuper moins d'espace. En maison individuelle par exemple, le R+2 ou le R+1+combles aménagés ne sont techniquement pas faisables.
Pas d'évolution du traitement de la cinquième façade qui n'autorise toujours pas la création d'espaces intérieurs utiles alors que les toitures sont envisagées comme des espaces extérieurs privatifs potentiels.
Végétaliser les toitures par une couche de terre de 50cm, c'est une façon de ne pas en avoir, alors que l'on connait bien leurs qualités. Surcharge trop importante sur les structures, complexités de mise en oeuvre et d'entretien qui finissent en de grandes étendues de terre brulée. Pourquoi ne pas (ré) ouvrir le choix d'une végétalisation extensive, éventuellement en agréant directement des systèmes, et obtenir une végétalisation qui dure avec un entretien minime, simple à réaliser, et qui s'adapte à toute typologie de structure...
Les constructions en limite qui sont toujours limitées à une longueur de 6m. C'est déjà trop faible pour un garage mais çà autorise difficilement une mutation vers un logement (parents, ados, etc.), alors que l'OAP fixe à 45 m2 la surface d'un T2. Une emprise au sol de 6x6m, çà ne conduit qu'à 29 m2 de surface utile et çà condamne arbitrairement l'évolution du tissu bâti diffus existant...
Cette nouvelle mouture du règlement semble omettre toutes les opportunités disponibles pour atteindre les objectifs proposés.
Il privilégie la limitation et l’empêchement, ce qui est le propre d’un règlement malgré tout, mais sans pour autant laisser le champs libre aux intuitions, à de nouvelles stratégies d’implantation où aux innovations qui pourraient être amenées par les porteurs de projet.
En quelques exemples :
Maintenir deux définitions contradictoires pour l’emprise au sol et notamment celle du Code de l’Urbanisme, particulièrement limitative, pouvant impacter la surface de plancher développée à emprise au sol équivalente. Pourquoi maintenir une ambiguïté alors qu’il y a clairement un choix raisonné et raisonnable de permettre une meilleure efficience dans l’usage du sol en favorisant des niveaux supérieurs qui peuvent déborder de celui en contact avec le sol, réduisant alors '“intelligemment” le problématique d’artificiliasation tout en limitant l’impact sur la surface de plancher totale. Il faudrait au contraire aller plus loin :
Augmenter la profondeur des débords qui ne constituent pas de l’emprise au sol, à l’image des saillies sur voie, en conditionnant la profondeur à la hauteur au-dessus du sol pour ne pas pénaliser l’apport solaire sur les façades ou l’infiltration des eaux de pluie.
Dans la continuité, introduire un calcul hybride qui décompterait partiellement l’emprise au sol des volumes qui ne reposent que sur des poteaux tout en maintenant les espaces de pleine terre qu’ils abritent, pour autoriser un nouvel équilibre entre bâti et espace naturel, voire conduire à l’émergence de quelques solutions architecturales innovantes… hein, Corbu…
Clarifier la position vis à vis du Code de l’Urbanisme qui dispense de toute autorisation les constructions d’une emprise au sol inférieure à 5m2, en ne décomptant pas de l’emprise au sol totale tous les “petits” volumes dispersés sur le terrain qui peuvent s’avérer utiles ou participer aux conforts des occupants : local poubelles, abri à vélo, terrasse abritée, etc. Ce qui pénalise actuellement la surface de plancher à réserver aux usages nobles du projet.
Une définition contradictoire des espaces libres, végétalisés et de pleine terre, qui conduit à des erreurs d’interprétation côté concepteur et/ou instructeur. Par exemple, une aire de stationnement dont le revêtement est perméable, est simultanément un espace de pleine terre tout en étant exclue des espaces libres dont les espaces en pleine terre font partie… Disons que c’est une faute de rédaction. Mais dans le même temps, le mode de calcul des espaces verts prescrits par les règlements de zone interroge également. L’évolution d’une construction existante est compromise par ce calcul qui semble ne pas la soumettre aux mêmes objectifs que les constructions neuves tout en l’empêchant de se rendre non conforme. Typiquement, un projet qui prévoirait la division d’un bâtiment existant en plusieurs lots, logiquement vertueux et économe en ressources, qui nécessiterait donc la création de nouveaux accès, cheminements et autres zones de stationnement éventuelles, et par conséquent la réduction éventuelle d’espaces verts existants, se trouve donc empêché par un point du règlement auquel il n’est pas sensé être soumis…
Le linéaire des sailles déductibles de l’emprise au sol qui serait réduit à 50% du linéaire de façade. Effet induit: les balcons filants ne sont plus possibles car ils pénalisent la surface de plancher qui peut être développée. Ou encore, les débords de volume qui participent à la définition architecturale des bâtiments et qui permettent d’amener simplement de l’ombre sur les façades qu’ils surplombent vont également pénaliser l’emprise au sol. Quel est le sens de cette “nouvelle” orientation, qui signe en définitive un retour en arrière, si ce n’est pas limiter une orientation technique et architecturale souvent prise par les architectes…
La profondeur de la bande constructible qui n’envisage toujours pas qu’une terrasse doit dépasser les 2m de profondeur pour passer du statut d’espace utile à espace profitable. Si un des objectifs est de “redonner” du sens et de l’intérêt à l’habitat collectif, il faut également lui permettre d’atteindre sur certains points les niveaux d’agréement qu’offre l’habitat individuel. En clair, la profondeur d’une terrasse en étage ne doit pas pénaliser l’emprise au sol, qui trouve donc un intérêt à être calculée selon les principes évoqués plus haut, ou la surface de plancher en cherchant la profondeur manquante à s’incorporant dans la bande constructible.
Le calcul et la définition de la hauteur totale qui pose souvent des difficultés sur les terrains avec une topographique particulièrement accidentée, conduisant arbitrairement à une réduction de la surface de plancher qui peut être mobilisée, du fait de son caractère absolu et en tout point. Parce que déjà rencontré dans un projet, il devient impossible d’aménager des moyens d’accès à un terrain qui comporte une différence d’altimétrie de 12m entre ses deux parties exploitables, alors que la hauteur est limitée à 7m pour la destination du projet…
Le règlement se veut à la fois très exhaustif tout en ne pouvant pas anticiper sur toutes les nouvelles formes d’usage qui pourraient en être fait, et en ce sens il semble d’avantage vouloir fermer les portes plutôt que laisser libre cours à la créativité.
Prendre pour acquis la définition de l’OMS (1946), «La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité» et en déduire “l’importance de développer un urbanisme favorable à la santé dans le PLUi” , devrait logiquement conduire à une dans un nouvelle forme de flexibilité dans la manière de concevoir les bâtiments et leur environnement. Plus d’obligations pour un résultat de meilleure qualité. Pour autant l’application de la règle semble plutôt devoir conduire à une monotonie des formes et des expériences vécues, la reproduction comme point d’aboutissement plutôt que comme point de départ pour de nouvelles initiatives.
Les concepts d’habitat intermédiaire AUTOMINI-1 et le concept de tiny house IXAMINI sont actuellement inconstructibles au regard des règles du PLUi applicables à la destination habitation dans certains secteurs.
Ils ne peuvent le devenir que dans des secteurs où la densité attendue / prévue est plus forte et donc où ils n’ont pas de pertinence. En tissu pavillonnaire ou d’habitat diffus, ils sont réglementairement empêchés par la règle limitant la hauteur à 7m.
Ce ne sont pas les qualités ou défauts de ces projets, cela relève d’une appréciation personnelle, qui doivent guider l’analyse de la règle.
La seule question devrait être d’interroger les opportunités: est-il cohérent de brider les capacités de développement des projets qui permettent de répondre aux trois objectifs de la nouvelle OAP: "NATURE EN VILLE - SANTÉ - RÉSILIENCE" ?
Evolution du PLUi VS stratégie de conception . Olivier ARMAND
Texte initialement publié sur Linkedin en Octobre 2023 . En italique: partie présente uniquement sur le blog